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Quelle(s) place(s), quel espace public les livreurs à vélo occupent-ils ? Quelles stratégies mettent-ils en œuvre pour l’optimiser ? L’espace public connaît de nouveaux usages générant de nouveaux rapports sociaux, de nouvelles tensions, mais aussi de nouvelles représentations.

#56 - Livreurs à vélo : visibles/invisibles - Emilie Aunis
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©PHOTOPQR/L’ALSACE/Vincent VOEGTLIN ; Colmar ; 16/10/2021 ; Des livreurs des société Uber Eats, Deliveroo, Just Eat patientent avant de réceptionner leur commande sur la place Scheurer Kestner , à Colmar le 16 octobre 2021.

Emilie Aunis est sociologue, responsable d’études à l’INRS France – Santé et sécurité au travail. A l’occasion de travaux post-doctoraux, elle a co-signé avec Hélène Stevens, maîtresse de conférence à l’Université de Poitiers (Laboratoire GRESCO), l’article : Patienter sur les places et foncer dans les rues. Quand les coursiers occupent l’espace public, dans la revue en ligne Images du travail, travail des images dans le n° 11 (septembre 2021) : Travailler dans la rue !

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Numéro dirigé par Henri Eckert et Arnaud Mège

L’économie de plateforme a créé un nouveau type de travailleur : les livreurs à vélo dans des “univers de travail très prescrits et très contraints”, dont les “activités de services [sont] peu valorisées et […] doivent passer inaperçues”.

Toutefois, des marges de manœuvre sont-elles possibles ? “Refus de s’en remettre totalement à l’application conçue pour encadrer et contrôler leur travail et imposer gestes et cadences, refus de ne pas se soumettre à cette machine algorithmique, de ne pas y être associé (Gaborieau, 2017), mais de chercher constamment, dans ses failles, les marges de manœuvre qui permettent d’affirmer son libre-arbitre, de garder une prise, aussi minime soit-elle, sur le travail, et mieux, de se le réapproprier”.

Entre visibilité et invisibilité, ils cherchent dans un constant effort à optimiser leur circulation dans l’espace public, y compris le temps d’attente. Ils y développent des “compétences invisibles [qui] vont aussi de pair avec des injonctions à se rendre invisibles, qui se voient parfois renversées lors des mobilisations”.

Le partage de cet espace est source de nombreuses tensions avec les autres usagers “comme si leur seule présence pouvait déranger, rappelant l’existence des hiérarchies sociales et des métiers.”

Terrain Social investit la rue avec la sociologue Émilie Aunis, à la rencontre des livreurs de rue !

Pour nourrir la réflexion sur Le Monde.fr : Des livreurs à vélo ubérisés reprennent leur destin en main

Lectures engagées :
Livreurs : ils établissent un rapport de force dans la lutte contre les plateformes
Invisibles – épisode 1 : les livreurs

Hugues Chevarin