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Ses formes, ses pratiques, ses définitions ont beaucoup évolué depuis dix siècles en Occident, mais depuis la Révolution industrielle, ses usages sont de plus en plus en contradiction avec les législations.

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©PHOTOPQR/L’EST REPUBLICAIN/MAXPPP

“Tout est mystère dans l’Amour,
Ses flèches, son carquois, son flambeau, son enfance :
Ce n’est pas l’ouvrage d’un jour
Que d’épuiser cette science. […]”

(La Fontaine, L’amour et la folie.)

En va-t-il du travail (le mot, ses définitions, sa ou ses valeurs, …) comme de l’amour ?

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La sociologue Marie-Anne Dujarier, professeure à l’Université de Paris-Diderot, chercheure et membre du Laboratoire de changement social et politique (LCSP) et membre associée du LISE (CNRS-CNAM) , publie un essai, Troubles dans le travail, Sociologie d’une catégorie de pensée, aux Presses Universitaires de France.

Elle y réussit un tour de force, en donnant à comprendre, à entendre toutes les nuances d’un mot. Traquant dans les dictionnaires, les nombreuses définitions, offrant un tableau historique des différentes conceptions du travail du Moyen-âge à nos jours, elle en montre toute la diversité, la complexité qui irrigue cette catégorie de pensée.

Toutefois, elle s’attache, aussi et surtout, à voir là où le bât blesse, à pointer les ombres du tableau !

“Cette recherche m’a en effet emmenée bien plus loin que ce que j’anticipais : les pratiques contemporaines dont la qualification comme “travail” fait débat, doutes ou oppositions s’avèrent être légion […]. Celles dans lesquelles activité, production, utilité et emploi pour la subsistance sont déliées, concernent finalement la majorité de la population. Chacune et chacun de nous, d’ailleurs, au fil de l’existence, ne cesse de rencontrer ces situations étranges, difficiles à qualifier de travail et parfois violentes par cette ambiguïté.”

Que recouvre précisément le mot “travail”, sa ou ses définitions ? Quelle place l’emploi occupe-t-il au sein de la sphère travail ? Quelles activités (le bénévolat, le travail domestique, entre autres…) n’y sont pas reconnues ?

“La manière dont notre société encadre “les aidants familiaux” est un bon analyseur de l’ambiguïté dans laquelle nous sommes, au moment de qualifier le care comme du travail ou non.”

Les institutions, les organisations en charge du travail doivent-elles évoluer ?

“Nos institutions reconnaissent ainsi comme “travail” des pratiques inutiles et nocives, et excluent de cette qualification des tâches utiles, profitables et vitales, redoublant alors le trouble jeté sur la catégorie de pensée (travail)”.

Ce n’est pas le moindre des paradoxes auquel se trouve confrontée notre société contemporaine, occidentale et libérale !

Et en particulier “au cœur de l’emploi” : “[…] ce que les femmes et les hommes font réellement, pour réaliser une tâche rémunérée est bien plus large, subtil, complexe et intense que ce que l’employeur et ses gestionnaires peuvent ou veulent en savoir”.

De l’importance de repenser les définitions, les institutions, les pratiques de ce que l’on nomme “travail” !

Terrain Social vous propose, à cette occasion, de déplier, avec Marie-Anne Dujarier, un mot : le mot “travail”.

Pour poursuivre la réflexion, la série Travail, Salaire, Profit (Arte Editions)

Hugues Chevarin