Social
Quelles sont les structures d’accueil ? Sont-elles adaptées et suffisantes ? Quels sont les effets délétères de la détention sur le mineur incarcéré ? Comment les droits fondamentaux du mineur sont-ils respectés, en particulier, en ce qui concerne la continuité éducative ?
MEDIA
©Alexis Sciard / IP3; Fleury Merogis, France, February 13th, 2020 – The main entrance of Fleury Merogis men’s prison (IP3 PRESS/MAXPPP)
“Quand on ouvre une école, on évite, vingt ans plus tard, d’ouvrir une prison”.
Attribuée à Victor Hugo !
Le Guide de la justice des mineurs publié en novembre 2021 par le Ministère de la Justice, dit : “La continuité de l’accès du mineur à l’enseignement ou à la formation est assurée en détention, et l’insertion professionnelle est privilégiée dans l’accompagnement éducatif.”
Isabelle Dautresme, journaliste spécialisée sur les questions d’éducation, travaille pour Le Monde, Alternatives économiques, Phosphore ou Topo, et le dessinateur Bast, qui a animé un atelier bd dans un quartier de détention pour mineurs, enseigne à l’Ecole Supérieure des Métiers de l’Image à Bordeaux, ont signé aux éditions Futuropolis, 17 piges, Récit d’une année en prison.
Ben, le personnage principal de 17 piges, est arrêté dans son lycée et conduit à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis, la plus grande d’Europe, qui “accueille” 97 mineurs. Il est maintenu en détention provisoire, pour des faits très graves, dans l’attente d’une hypothétique date de procès !
“Les mineurs ne peuvent être incarcérés que dans un quartier spécial d’un établissement pénitentiaire (47 prisons en disposent), ou dans un établissement pénitentiaire spécialisé pour mineurs (6 au niveau national). Ils étaient 804 au 1er janvier 2020 contre 672 au 1er janvier 2010, dont 82% en détention provisoire alors qu’ils sont présumés innocents.” – (CGLPL* – Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté)
Cette incarcération vient interrompre la formation, les études, pour tout dire l’avenir !
“Utiliser l’enfermement pour les soigner, les éduquer, les insérer constitue une contrainte dont la gravité est telle qu’elle ne peut être qu’un dernier recours et que son usage doit être limité par les principes de légalité, de nécessité et de proportionnalité” – (CGLP*, Recommandations minimales pour le respect de la dignité et droits fondamentaux de personnes privées de de liberté, Journal officiel du 4 juin 2020).
Tout empreint de simplicité et de sobriété, ce récit s’emploie à montrer sans fard la réalité d’un Quartier pour Mineurs en maison d’arrêt. D’abord l’incompréhension de Ben, puis la solitude et la violence qui rythment son quotidien, contredisent les principes ci-dessus énoncés. Dans de telles conditions d’incarcération, comment est-il possible pour un mineur de poursuivre ses études, prendre la mesure de la situation ou même d’entamer une introspection ?
Dans la terrible solitude de sa cellule, Ben, n’a pour tout horizon qu’une date, celle de son 18ème anniversaire, celle de sa majorité, celle d’un monde plus violent encore, son passage chez les majeurs.
Sans rien dissimuler de la gravité des faits qui lui sont reprochés, le personnage de Ben incarne l’échec d’une société qui privilégie la réponse répressive en lieu et place de la prévention, le manque de moyens alloués à cette même justice, et la défaillance du nécessaire encadrement éducatif de ces mineurs incarcérés.
Terrain Social, cette semaine, avec Isabelle Dautresme, et le dessinateur Bast, plonge dans le douloureux quotidien d’un mineur en prison !
17 piges, Récit d’une année en prison, nous oblige à un mieux d’humanité et de mansuétude !
“On n’est pas sérieux quand on a 17 ans.
[…]”
Arthur Rimbaud, Roman.
Hugues Chevarin
* Les droits fondamentaux des mineurs enfermés (Site du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté)
Plaquette de présentation de la Protection Judiciaire de la Jeunesse, quelques données chiffrées à mettre en regard du dossier réalisé par Isabelle Dautresme qui conclut la bd 17 piges.
Rappels historiques :
A propos de l’ordonnance de 1945
La loi du 9 mars 2004 portant sur l’adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, dite loi Perben II
Et en cette semaine de la poésie, Arthur Rimbaud, Roman !